Les Pôles magnétiques se déplacent : explications

Les étapes des inversions magnétiques se précisent

Les inversions magnétiques de la Terre se sont produites de multiples fois depuis des centaines de millions d’années. Mais jusqu’à aujourd’hui, on ne savait pas très bien ce qui se passait à chaque changement de polarité de la Planète. Selon un groupe de géophysiciens français et américains, ces inversions se produisent en trois étapes et en quelques milliers d’années seulement.

En complément des articles de presse ci-dessous voici une vidéo très claire qui explique bien le phénomène







La publication dans le journal Nature d’un groupe de géophysiciens (de l’Institut de physique du globe de Paris et de l’université d'Hawaï) étudiant le paléomagnétisme de la Terre aurait surement intéressé Haroun Tazieff et Maurice et Katia Krafft s’ils étaient encore parmi nous. Elle concerne les inversions du champ magnétique de la Terre découvertes pour la première fois dans une couche d’argile en Auvergne en 1905. Ces inversions allaient se révéler cruciales pour convaincre dans les années 1960 la communauté des chercheurs en géosciences de l’exactitude de la théorie de la dérive des continents publiée en 1912 par Alfred Wegener


Aujourd’hui, la théorie de la tectonique des plaques s’est imposée et elle constitue la forme moderne des idées de Wegener. On tente toujours de percer les secrets de l’origine et de l’évolution de la magnétosphère terrestre et surtout de ses inversions. Depuis des décennies, le changement de polarité de la composante dipolaire du champ magnétique de la Terre, enregistré dans une couche d’argile à Pont Farin il y a 4,8 millions d’années, était attribué au comportement d’une dynamo autoexcitatrice résidant dans le noyau liquide ferreux de la Terre. Cette hypothèse a reçu une confirmation très sérieuse il y a quelques années grâce à l’expérience VKS.

Sur cette image on voit la couche d'argile de pont Farin cuite par la coulée de lave (grise) l'ayant recouvert il y a environ 4,8 millions d'années. Cette coulée a enregistré la direction du champ magnétique de l'époque. Elle était inverse de celle d'aujourd'hui.
Sur cette image on voit la couche d'argile de pont Farin cuite par la coulée de lave (grise) l'ayant recouvert il y a environ 4,8 millions d'années. Cette coulée a enregistré la direction du champ magnétique de l'époque. Elle était inverse de celle d'aujourd'hui. © Laurent Sacco

Les inversions du champ magnétique se produisent à intervalles irréguliers pouvant varier de 100.000 ans à plusieurs millions d’années. Elles concernent la partie dipolaire de la magnétosphère, c'est-à-dire celle qui se comporte comme si la Terre était un gros aimant et qui constitue 90 % du champ magnétique total. Les archives magnétiques de la Terre ont révélé qu’avant une inversion, cette composante s’affaiblit lentement en quelques dizaines de milliers d’années. Le basculement des pôles intervient ensuite en quelques milliers d’années.

Des pôles magnétiques à l'équateur

Malheureusement, les archives utilisées jusqu’à présent, essentiellement celles contenues dans des sédiments, ne permettaient pas de connaître avec certitude les événements se déroulant pendant ces milliers d’années, ni si des caractéristiques de ces phases d’inversion se répétaient à chaque fois. Toutes ces informations sont bien sûr importantes pour contraindre les théories et les modèles de l’intérieur de la Terre, plus précisément, ce qui se passe dans la partie liquide du noyau où les courants de convection brassant l’alliage de fer et de nickel liquide qui le constituent génèrent le champ magnétique de la Terre.

Illustration schématique des 3 phases (précurseur, renversement de polarité et rebond) du processus de l’inversion des pôles magnétiques. Le temps en abscisse est en milliers d'années et en ordonnée est portée la direction du champ.
Illustration schématique des 3 phases (précurseur, renversement de polarité et rebond) du processus de l’inversion des pôles magnétiques. Le temps en abscisse est en milliers d'années et en ordonnée est portée la direction du champ. © Valet et al.

Les géophysiciens ont finalement trouvé plusieurs coulées volcaniques superposées, leur permettant d’avoir la résolution temporelle désirée pour étudier les détails du processus d’inversion et ce sur une période de l’âge de la Terre comprise entre -0,8 et -180 millions d’années. Ils ont découvert qu’à chaque inversion, la même structure revenait de manière récurrente.

Comme le montre le schéma ci-dessus, tout se passe en trois étapes qui durent chacune environ 2.000 ans. La première est la une phase dite précurseur où le pôle se déplace vers l’équateur avant de reprendre sa position d’origine, suivie d’une phase de transition rapide vers une polarité inverse. Cette polarité inverse n’est pas tout de suite véritablement établie car il s’ensuit une phase de rebond ramenant les pôles vers l’équateur avant qu’ils ne basculent à nouveau pour rester en place en attendant le début d’une nouvelle inversion.
source futura-sciences.com 

La géodynamo



D’où viennent les champs magnétiques de la Terre, de cinq autres planètes du système solaire (Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune, Mercure), et du Soleil ?
En 1919, Sir Joseph Larmor proposa trois hypothèses pour expliquer le champ magnétique des taches solaires. Il nota en conclusion de son travail que l'une d'entre elles, que l'on appellera plus tard la théorie de la dynamo auto-excitée, permettrait également d'expliquer l'origine du champ magnétique terrestre, mais cela nécessiterait que l'intérieur de la Terre soit fluide.

Ce qui paraissait très improbable à l'époque, est aujourd'hui une certitude grâce à l'inversion des ondes sismiques traversant la Terre. On sait aujourd'hui que le noyau de la Terre (situé quelques 3000 Km sous nos pieds) est bien fluide pour sa plus grande partie. On sait également, grâce à la géochimie, qu'il est constitué principalement de fer. Le fer étant très bon conducteur de l'électricité, tous les éléments nécessaires pour la dynamo auto-excitée proposée par Larmor sont donc réunis dans les profondeurs de notre planète.


Vue écorchée de l'intérieur de la Terre. Les mouvements de fluide conducteur (structures tourbillonnaires en bleu) étirent les lignes du champ magnétique, leur donnant de l'énergie (Julien Aubert).


Si le noyau de la Terre est fluide, on sait aussi qu'en son centre, le fer cristallise pour former une graine solide (en gris sombre sur la figure) de plus d'un millier de kilomètres de rayon. Cette cristallisation libère des éléments légers ainsi que de la chaleur. Ces deux effets combinés entretiennent des mouvements de convection au coeur de notre planète. Ces mouvements sont soumis, comme l’atmosphère, à l’influence de la force de Coriolis. Ainsi, de gigantesques cyclones apparaissent dans le noyau externe (en bleu sur la figure). Dans un fluide conducteur, de tels mouvements ont la propriété d’amplifier un champ magnétique à partir d'un "bruit" initial. On peut comprendre ceci à l’aide du concept des lignes de champ magnétique. Ces lignes imaginaires sont en tout point parallèles à la direction qu’indique la boussole. Les mouvements de fluide tordent les lignes de champ magnétique, et les étirent à la manière d’élastiques (les lignes sont représentées en gris clair sur la figure). De même qu’un élastique étiré acquiert de l’énergie potentielle, des lignes de champ magnétique étirées acquièrent de l’énergie magnétique. Tel est le mécanisme de la géodynamo.

La dynamo de la Terre porte le même nom que la dynamo de bicyclette. Une dynamo de bicyclette est composé d’un aimant permanent qui est entraîné par la rotation de la roue de la bicyclette. Ainsi l’énergie cinétique est convertie en énergie électrique. Le champ magnétique variable qui en résulte induit du courant dans un bobinage de fil éléctrique. Ce qui rapproche les deux mécanismes à priori différents, c’est le phénomène de l’induction éléctromagnétique. La géodynamo ne fait pas appel à un aimant permanent (les températures extrêmes qui règnent au coeur de notre planète, de plusieurs milliers de degrés, feraient perdre à tout aimant ses propriétés magnétiques). C'est pour cette raison qu'elle est appelée "dynamo auto-excitée".

L’intérieur de la Terre n’est pas celui de Jupiter, et de Saturne ! Ces deux planètes gazeuses ont néanmoins en leur centre une couche d’hydrogène à l’état de métal fluide compressible, pour laquelle on peut formuler la même théorie dynamo que celle de la Terre. Uranus et Neptune sont, elles aussi, des planètes essentiellement gazeuses, mais cette fois on pense que c’est dans une couche de glace fluide ammoniaquée que la dynamo est produite. Pour le soleil, c’est dans un plasma (noyaux d’hélium séparés de leurs électrons) que la dynamo prend place. Autant de milieux différents les séparent, mais une cause commune rapproche les dynamos naturelles.

Le signal magnétique en provenance des planètes contient ainsi des renseignements sur leur structure, leur histoire, leur dynamique interne. Pour décrypter cette information, certains chercheurs réalisent des modèles numériques de la magnéto-hydrodynamique de l’intérieur de ces objets. D’autres l’étudient à partir de modèles réduits analogiques. Malgré tous ces efforts, les mécanismes fondamentaux à l'oeuvre dans ces objets restent encore très mal compris.

Emmanuel Dormy, PhD, Labo de Géomagnétisme Interne et Julien Aubert, PhD, Labo de Dynamique des Systèmes Géologiques

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