Témoignage : je suis homosexuel, la loi ne changera rien

Tom*, nous sommes amis depuis 2003. Tu ne m’as jamais caché ton homosexualité. Tu m’as souvent partagé tes combats, tes doutes, ta souffrance aussi. Peux-tu me dire pourquoi c’est si difficile pour toi alors qu’aujourd’hui, avec ces projets de loi, on a l’impression que tous ceux qui sont comme toi, vont être soulagés, ‘’libérés ‘’ ?

-          - C’est une loi de dupes, d’hypocrisie. La loi ne changera rien à ce que je vis. C’est comme si on faisait voter une loi pour dire qu’être unijambiste est un état normal et que grâce à cette loi, on peut courir ! Mais bon, si ça fait plaisir  à certains.

-          Donc pour toi, cela ne changera rien ?


-          Je ne sais pas, sur la forme, je me sentirais peut-être moins décalé, et encore je ne suis pas sûr… parce que le regard de l’autre, c’est d’abord, mon propre regard sur moi-même et quoi qu’on décide, qu’on vote, cela ne changera pas le fait que je vis mon homosexualité comme une vraie souffrance.

-          mais pourtant tous ne souffrent pas ?

-          Pour moi, et je pense pour tous les homos d’ailleurs, on sait pertinemment que notre particularité n’est pas ‘’naturelle’’.  Comme tout le monde, j’ai un père et une mère. J’ai aussi quatre frères et des sœurs. Pour les autres, cela ne leur parle peut-être pas, mais pour moi en tout cas, toute ma chair, toutes mes cellules savent que je suis issu de ce duo. C’est écrit en moi comme une empreinte de ‘normalité’, tout comme mes cellules savent que si je veux des enfants, il n’y a pas d’autres moyens naturels que celui-là.

-          Et alors ?

-          Alors, c’est une souffrance constante, une rivalité entre ce que je sais être fondamental et mon orientation sexuelle qui dit le contraire. J’ai passé toute ma vie entre les deux, et je passerai probablement le reste de la même manière. La loi ne changera rien à cet état de fait.

-          Mais d’autres semblent très bien vivre leur différence puisqu’ils réclament les mêmes droits que les couples mixtes ?

-          Peut-être, mais ça j’en suis moins sûr. Je ne connais pas de gays véritablement heureux. Ils composent sans doute mieux que moi avec ce qu’ils sont mais ce n’est pas aussi simple que ça en réalité. Le simple fait d’être homo et de désirer un enfant est un vrai problème de dualité permanente. Quelque chose cloche ! se marier, pouvoir adopter, ça ne résoudra pas la question.

-          C'est-à-dire ?

-          Quand un couple homme-femme ne peut avoir de gosses, il y a toujours une frustration, une blessure. Quand ils adoptent, il y a toujours quelque chose en eux qui les renvoient à leur stérilité. Autour de moi, dans les familles qui ont vécu l’adoption, on parle toujours de leurs enfants ‘’adoptés’’  même s’ils le sont depuis 30 ans ! on rajoute toujours le ‘’adopté ‘’ au mot enfant. On ne peut rien y faire, il y aura toujours les vrais de vrais parents, et les  autres, qu’ils soient hétéros ou homos. La nature a ses sélections depuis toujours, quoiqu’on fasse.

-          Mais les parents qui ont adopté construisent une famille, non ?

-          Oui, bien entendu ! ils se ‘’rapprochent’’ du schéma naturel  mais à quel prix ! les enfants sont parfois les premiers à subir le traumatisme de l’abandon, puis de l’adoption. D’un côté, ils ne cadrent pas avec leurs véritables concepteurs biologiques qui les rejettent et de l’autre côté, ils doivent correspondre à des parents en mal d’enfant. C’est beaucoup !

-          Quelle différence cela fait avec les couples homosexuels qui veulent adopter ?

-          C’est déjà tellement compliqué pour moi de vivre ma différence dans un milieu familial « normal » alors j’imagine que si je devais la vivre dans un couple homo, en plus adopté,  je serais davantage paumé. Il me faudrait assumer mon homosexualité, mon adoption et l’homosexualité de mes parents. C’est beaucoup me demander.

-          Pourquoi serais-tu obligé d’assumer tout ça, je ne comprends pas ?

-          Parce que comme je le disais au début, il y a en moi, une empreinte de normalité inscrite dans tout mon être, celle qu’il faut un couple mixte, homme-femme, pour concevoir un enfant, que je suis issu de ce binôme et que personne ne pourra jamais résoudre ça, sauf si demain, on nous fabrique tous dans des laboratoires ! c’est dans mes tripes, mes gênes, et je ne peux rien faire

contre ça. Ça me poursuivra ou me devancera toujours ! c’est déjà dur, douloureux d’assumer ma différence par rapport à cet état de fait alors… celles des autres !



-          Tom, une toute dernière question me concernant. Je suis contre le mariage homosexuel, suis-je intolérante, béni-oui-oui, intégriste, ringarde  pour autant ?

-          Toi ?!!!  n’importe quoi !!!!!

Notre conversation,  trèèèèèès sérieuse, se clôture sur un immense éclat de rire partagé !

Geneviève. http://www.genevievevigneschroniques.com
* Tom est un nom d'emprunt

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