LE JEÛNE AUSSI EFFICACE QUE LA CHIMIOTHÉRAPIE POUR LUTTER CONTRE LE CANCER


Un jeûne de quelques jours protège les cellules normales, les souris, et potentiellement les humains contre les effets secondaires nocifs d'une variété de médicaments utilisés dans la chimiothérapie. L’équipe de Valter Longo, professeur de gérontologie et de biologie à l'université de Californie du Sud, principal auteur de cette étude a montré qu’une période de jeûne appliquée sur des cellules de levure (S. cerevisiae ) génétiquement transformées pour ressembler à des cellules cancéreuses deviennent très sensibles à plusieurs toxines (1).  



L’équipe de V. Longo a ensuite montré que 15 des 17 lignées de cellules cancéreuses de mammifères traitées de la même manière étaient également beaucoup plus sensibles aux agents de chimiothérapie.   Chez la souris des périodes répétées de jeûne étaient aussi efficaces que les agents chimiothérapeutiques pour retarder la progression des tumeurs spécifiques. L’équipe constate aussi que le jeûne associé à la chimiothérapie augmente l'efficacité de ces médicaments contre le mélanome, le gliome, et les cancers du sein.



Chez les modèles murins de neuroblastome, des cycles de jeûne associés à la chimiothérapie entraînent une survie au cancer à long terme alors que la chimio seule ne parvient pas à le faire. Des cellules (4T1) du cancer du sein soumises à de courts termes de privation nutritionnelle, ont entraîné une augmentation du stress oxydatif, de l’activité des enzymes d’autodigestion, des dommages à l'ADN et du suicide cellulaire (l'apoptose).  Ces études suggèrent que plusieurs cycles de jeûne favoriseraient une sensibilisation différentielle au stress pour une grande variété de tumeurs et pourraient potentiellement remplacer ou augmenter l'efficacité de certains médicaments de chimiothérapie dans le traitement de divers cancers.

Le traitement

Le traitement consistait à priver de nutriments les cellules de levures modifiées ou les souris porteuses de cancers humains durant les deux jours qui précèdent la chimiothérapie, durant et un jour après la chimiothérapie.  Ce traitement étant répété à chaque séance de chimiothérapie.

Des taux de guérison de 20 à 40%

Les chercheurs ont observé que les multiples cycles de jeûne combinés à la chimiothérapie guérissaient 20% de certains cancers des plus agressifs chez ces souris.  Ce taux de guérison grimpait à 40% pour les souris atteintes par ces mêmes tumeurs mais à un stade moins avancé, alors qu’aucune de ces souris n’avait survécu à un traitement unique de chimiothérapie.

Qu'en est il chez l’homme ?

En juin 1993, le médecin ethnologue Jean-Pierre Willem rapportait dans son livre (2) qu’il existait des régions du monde où les maladies des pays développés dites «  maladies de civilisation » comme les cancers et les maladies cardiovasculaires, sont très peu répandues.  En vivant soit chez les Hounzas du Karakoram, les Abkhases du Caucase russe, ou chez les habitants de la Vallée des centenaires en Équateur, il avait remarqué que tous ces peuples avaient un point en commun : ils suivaient tous à un moment de l’année une diète alimentaire restrictive sévère qui mettait leur organisme en acidose. C’est le jeûne ou cette diète restrictive qui mettait ces ethnies à l’abri des cancers.

Plus tard, en 2007, le regretté David Servan-Schreiber, chercheur en neurosciences, rappelait dans son livre « Anticancer », que le cancer se nourrit de sucre (3).  Il rappelait les travaux du biologiste allemand Otto Heinrich Warburg (Prix Nobel de Médecine) qui avait découvert que le métabolisme des tumeurs cancéreuses était largement dépendant de leur consommation de glucose.  C’est d’ailleurs comme cela que l’on peut détecter au moyen PET scan les tumeurs cancéreuses qui se cachent dans le corps.
On sait aujourd’hui qu’une prise de sucre est suivie par une sécrétion massive d’insuline et d’IGF-1 (insulin-like growth factor-I, que l’on retrouve abondamment dans le lait de vache) qui stimulent directement non seulement la croissance des cellules cancéreuses (4), mais aussi leur capacité à envahir les tissus voisins (5).  Des chercheurs ont même montré que les cellules du cancer du sein inoculé à des souris, réagissaient beaucoup moins bien à la chimiothérapie quand le système insuline était activé par la présence de sucre  (6).
Une autre étude, encore chez des souris auxquelles on avait inoculé un cancer du sein et qui étaient nourries avec une diète à index glycémique élevé ou faible, avait montré qu’au bout de deux mois et demi, les 2/3 des 24 souris dont le glucose sanguin montait régulièrement étaient mortes, alors qu’une seule des 20 souris qui avaient un régime à faible index glycémique était morte (7).

Une étude préliminaire associant jeûne et chimiothérapie chez l’homme

Valter Longo a rapporté dans une étude de 2009 (8) qu’il avait essayé sur 10 patients volontaires diagnostiqués avec différents types de tumeurs malignes des cycles de jeûne avant (48-140 heures) et / ou après (5-56 heures) la chimiothérapie.  Aucun de ces patients, qui avaient reçu une moyenne de 4 cycles de chimiothérapie différente en combinaison avec le jeûne, n’avait rapporté des effets secondaires importants causés par le jeûne lui-même autres que la faim et des étourdissements.
Chez ces patients, le jeûne n'avait pas empêché la réduction induite par la chimiothérapie du volume tumoral ou des marqueurs tumoraux.  Les volontaires avaient ressenti une réduction de la fatigue, de la faiblesse et des effets gastro-intestinaux secondaires à la chimiothérapie. Les 10 cas, présentés dans cette étude, montrent que le jeûne en combinaison avec la chimiothérapie est faisable, sûre, et a le potentiel pour atténuer les effets secondaires causés par la chimiothérapie. Il faut attendre des essais cliniques contrôlés et randomisés pour déterminer l’efficacité du jeûne associé ou non à la chimiothérapie.  

Mise en garde

Valter Longo rappelle que le jeûne pourrait être risqué chez certains individus.  Il peut notamment provoquer une baisse de la tension artérielle.





Le jeûne périodique retarde la croissance des tumeurs et sensibilise une large variété de cancers à la chimiothérapie.  Interview du professeur Valter D. Longo


Références:

1)     Changhan Lee, Lizzia Raffaghello, Sebastian Brandhorst, Fernando M. Safdie, Giovanna Bianchi, Alejandro Martin-Montalvo, Vito Pistoia, Min Wei, Saewon Hwang, Annalisa Merlino, Laura Emionite, Rafael de Cabo and Valter D. Longo. Fasting Cycles Retard Growth of Tumors and Sensitize a Range of Cancer Cell Types to Chemotherapy. Fasting Cycles Retard Growth of Tumors and Sensitize a Range of Cancer Cell Types to Chemotherapy. Sci. Transl. Med. DOI: 10.1126/scitranslmed.3003293.http://stm.sciencemag.org/content/early/2012/02/06/scitranslmed.3003293
2)    Jean-Pierre Willem. Prévention active du cancer.  Il y a des ethnies qui n’ont pas le cancer… Aux Editions du Dauphin. Juin 1993.
3)    David Servan-Schreiber. Anticancer. Prévenir et lutter grâce à nos défenses naturelles.  Ed. Robert Laffont. 2007.
4)    Grothey A, Voigt W, Schöber C, Müller T, Dempke W, Schmoll HJ. The role of insulin-like growth factor I and its receptor in cell growth, transformation, apoptosis, and chemoresistance in solid tumors. Cancer Res Clin Oncol. 1999;125(3-4):166-73.
5)    Long LNavab RBrodt P. Regulation of the Mr 72,000 type IV collagenase by the type I insulin-like growth factor receptor. Cancer Res. 1998 Aug 1;58(15):3243-7.
6)    Dunn SE, Hardman RA, Kari FW, Barrett JC. Insulin-like growth factor 1 (IGF-1) alters drug sensitivity of HBL100 human breast cancer cells by inhibition of apoptosis induced by diverse anticancer drugs. Cancer Res. 1997 Jul 1;57(13):2687-93.
7)    Santisteban GA, Ely JT, Hamel EE, Read DH, Kozawa SM. Glycemic modulation of tumor tolerance in a mouse model of breast cancer. Biochem Biophys Res Commun. 1985 Nov 15;132(3):1174-9.
8)    Safdie FM, Dorff T, Quinn D, Fontana L, Wei M, Lee C, Cohen P, Longo VD. Fasting and cancer treatment in humans: A case series report. Aging (Albany NY). 2009 Dec 31;1(12):988-1007.

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