La Jeanne d'Arc de Jack Minier
"Jeanne d'Arcadie" est une
histoire dans l'Histoire, une vision tout-à-fait inhabituelle de Jeanne
d'Arc, qui donne une explication parfaitement hérétique par rapport à
sa légende officielle -- mais ô combien plus logique et rationnelle --
de l'irruption de la Pucelle d'Orléans sur la scène de l'Histoire.
Quatre ans de recherches dans les archives municipales
ou nationales, à défaut de pouvoir fouiller celles du Vatican, ainsi que
la lecture de dizaines d'ouvrages anciens, disparus des rayons des
libraires et même des musées au XXIe siècle mais disponibles sur la
bibliothèque virtuelle de Google (invention formidable !), m'ont amené à
repenser complètement la fameuse "légende dorée" de l'héroïne
française.http://www.jackminier.fr
Qui
était Jeanne d'Arc , histoire ou légende ? A l'heure où le nationaliste
tricolore se réveille, cette histoire de France tronquée et arrangée à
la gloire du pouvoir en son temps, et reprise depuis à son profit par
l'extrême droite, cette histoire là à besoin d'un éclairage. C'est ce
que fait le livre de jack Minier.
La « personnalité » de Jeanne d'Arc par Jack Minier
On
ne sait en vérité pas grand-chose sur la personnalité de Jeanne d'Arc,
tant son histoire a été interpolée et estompée par l'Eglise durant des
siècles... Il faut donc tenter de cerner son caractère en s'appuyant en
premier lieu sur ses actes, sur leur temporalité, et sur ce qu'elle a pu
dire dans la mesure où ses paroles n'auraient pas été trahies par les
rapporteurs.
C'est donc une tâche difficile et c'est évidemment en cela qu'elle est passionnante.
Tout
d'abord, il faut arrêter de penser cette héroïne selon sa légende comme
une « jeune fille » de 17 ans. Lorsqu'elle arrive à Orléans, elle a
déjà en réalité 21 ans, car elle n'est pas née en 1412 mais plus
probablement 5 ans plus tôt, en 1407, et pas à Domrémy mais à Paris, de
la liaison entre la reine Isabeau et son beau-frère le Duc Louis
d'Orléans.
Qu'elle
fut ou non encore « pucelle » au sens physiologique du terme est somme
toute très secondaire. La virginité des jeunes filles au Moyen-âge
était, ni plus ni moins qu'à notre époque, rien d'autre qu'une légende
urbaine, et le sens de l'expression populaire « Pucelle d'Orléans » dont
on la désignait dès avant son arrivée dans cette ville, ne signifiait
rien d'autre que « la fille du Duc d'Orléans » car chacun connaissait
son origine génétique au même titre que l'on connaissait celle du «
Bâtard d'Orléans », Dunois, son demi-frère.
Elle
n'était pas davantage Vierge au sens astrologique, et les férus de la
science de Thot-Hermès verront sans aucun doute une nette différence en
établissant son thème astral...
Nul
doute que de très hauts personnages de la Cour aient fait établir son
thème dès sa naissance, puisque la coutume était répandue à l'époque
d'interroger les astres sur le destin des enfants princiers. Et après
tout, la future Jeanne était une enfant bâtarde, certes, mais
d'ascendance doublement royale et par ses deux branches remontait à
Clovis et Clothilde !... pour ma part, j'oserai même dire... jusqu'à
Jésus et Marie-Madeleine !
Par
ailleurs, l'un des plus grands astrologues du temps n'était autre que
l'alchimiste Nicolas Flamel, de surcroit « Nautonier » c'est-à-dire
Grand-Maître de « l'Ordre de ND du Mont-Sion », véritable « Cercle
intérieur » du Temple dont, malgré son abolition un siècle plus tôt,
l'influence était toujours particulièrement grande... Quelques siècles
plus tard, sous Napoléon, la révélation de la fameuse « Charte de
Larmenius », par le FM:. Bernard Raymond Fabre-Palaprat, montrera sans
ambiguïté que les fameux « Armagnacs » soutenant le camp français du
dauphin Charles n'étaient autres que... des Templiers ! Après la mort de
Bertrand du Guesclin, ce sont en effet à trois comtes d'Armagnac
successifs à qui échût, de
1381 à 1451, la charge de grands-maîtres du Temple occulté.
Personnellement,
je n'accorde pas une confiance aveugle à cette pseudo-science qu'est
l'Astrologie, mais cependant il faut bien reconnaître quelques traits de
caractère plus ou moins accentués mais communs aux natifs de mêmes
signes.
C'est
ainsi que, née le 06 Janvier 1412 à Domrémy, Jeanne eut été du signe du
Capricorne ascendant Balance. Ce qui, selon les spécialistes en aurait
fait une « femme du monde », élégante et distinguée mais sans véritable
charisme... peut- être même, Ô horreur… une courtisane ?!...
Tandis
que née le 10 novembre 1407 à Paris elle était « Scorpion ascendantLion
», autant dire une véritable guerrière, servie par un incontestable
sens du « commandement » !... Les nobles chefs de guerre, un peu
machistes et au début condescendants, qui constituent son conseil à
Orléans ne manqueront pas de se plier à sa volonté inflexible face à
leur indiscipline et à l'influence douteuse des ribaudes qui suivent la
troupe.
Ce
qui ne l'empêchera pas pour autant d'être aimable et courtoise en
société, et notamment à la Cour, mais on voit bien qu'elle s'y ennuiera
très vite dans l'inaction...
Après
les batailles gagnées d'Orléans, Jargeau, Beaugency, Meung et Patay,
etc., le dauphin Charles ayant décidé de faire une pause à
Sully-sur-Loire, Jeanne ne tient pas en place !... Elle ne cesse de le
pousser à aller se faire couronner à Reims, puis à reprendre les villes
encore sous contrôle de l'Anglais. Elle se sent pressée par le temps et
contrainte par sa « mission » qu'elle veut mener à son terme. Mais la
douceur du climat ligérien ajoutée à la paresse de quelques-uns et à la
préférence de Charles pour la négociation auront raison de la fougue de
Jeanne. Elle partira bien seule au combat à Paris, où elle sera blessée
une seconde fois, puis à Compiègne où elle sera piégée à l'extérieur des
remparts dont on fermera la herse devant elle !
Trahison
ou simple bêtise ? On ne saura jamais. Mais c'en est fini de la Pucelle
victorieuse... Prisonnière, et transférée de châteaux en châteaux
jusqu'à l'heure d'être vendue aux Anglais, Jeanne n'acceptera jamais son
sort. Elle essaiera de s'enfuir de sa prison en nouant ses draps et en
sautant par la fenêtre, comme dans les meilleurs romans de cape et
d'épée qui s'en inspireront peut-être quelques siècles après... Peine
perdue. Elle se blesse une nouvelle fois, est reprise, et finalement
incarcérée au donjon du Château du Breuil à Rouen.
Son
procès va commencer... et, pour autant que l'on se fie à la version
latine de ce procès (les minutes originales en français sont perdues
depuis longtemps), il ne sera pas des plus limpides tant les questions
sont ambiguës et les réponses à double sens... quand Jeanne daigne
répondre à ses juges ! car elle ne reconnait aucune légitimité à ce
tribunal et signifie clairement de temps à autre qu'elle n'a aucune
intention de répondre à telle ou telle questions précises, notamment
lorsqu'elles touchent au « secret » qui la lie à son roi.
Et
c'est peut-être là, dans ses réponses aux questions de l'évêque
Cauchon, que l'on va pouvoir cerner davantage son caractère insoumis et
son esprit de répartie.
Par
exemple, lorsque Cauchon lui demande si elle est « en état de grâce »,
elle répond avec autant d'élégance que d'astuce : – « Si j'y suis, Dieu
m'y garde, et si je n'y suis pas, Dieu m'y mette ! »
Autres exemples de sa grande vivacité d'esprit :
Lorsqu'elle
arrive devant Troyes, avant le sacre de Reims, la petite troupe n'a pas
les moyens militaires de contraindre la ville à rallier le dauphin.
Mais ça ne la décourage pas car elle sait que Troyes est une pièce
importante de la reconquête psychologique. Elle va donc jouer la carte
psychologique et fait déposer des masses de fagots au pied des murailles
comme si elle était vraiment décidée à y mettre le siège... Ce coup de
poker menteur réussit. Deux jours après, la ville ouvre ses portes au
dauphin !
Et
lorsque dans le petit cimetière de Saint-Ouen, Cauchon lui demande
d'abjurer ses voix et de renoncer à l'habit d'homme pour sauver sa vie,
elle le fait, elle signe... mais elle signe « d'une croix » ! Alors
qu'elle savait parfaitement écrire et signait de son prénom, signer «
d'une croix » un document inadmissible pour elle, était à l'évidence une
façon de ridiculiser ce procès d'inquisition tout en restant
suffisamment habile pour sauver à la fois son corps et son âme. Les
apparences sont sauves pour l'Eglise puisqu'on l'a vue griffonner un
signe au bas de la cédule d'abjuration, mais elle n'avait en fait rien «
signé » de son nom.
Si
Jeanne est une battante – à tous les sens du terme --, c'est aussi une
femme volontaire et ferme dans ses convictions. Elle a une « foi »
évidente, je dirai même inébranlable en « Jhésus », avec un H, lettre
hiératique à haute signification spirituelle, comme dans son propre nom
JeHanne. Mais, à l'instar des Templiers, ça n'est probablement pas la
foi du dévot commun. Elle se sent investie, elle SAIT sa mission divine.
Et elle n'est pas la seule à la ressentir comme telle : Quand le
Grand-Maître du Temple lui-même, le comte Jean IV d'Armagnac, lui avait
demandé à quel pape il lui fallait obéir, elle avait réservé sa réponse
jusqu'à la prise de Paris, qu'elle ne réalisera jamais... Mais ça
signifiait tout de même qu'on la positionnait clairement au-dessus du
Saint-Père lui-même (ou plutôt des 3 saints-pères qui se disputaient le
siège pontifical à l'époque), et qu'elle assumait pleinement ce rôle
d'arbitre...
Assurance
?... Impudence ?... ou réelle conscience de sa mission sur Terre ?...
Si elle affiche jusque sur son étendard une vénération pour « Jhésus et
Marie » (Marie-Madeleine selon moi), elle se réfère sans cesse à son «
Roi du Ciel » sans que l'on puisse jamais vraiment le nommer DIEU... De
nos jours, elle dirait peut- être « Grand Architecte » ?
Les Anglais ont-ils raison de vouloir la taxer de sorcellerie ?
Non,
sans doute pas. Mais aux yeux de la Sorbonne, on n'est pas très loin de
l'hérésie... Un siècle plus tôt, elle eût été brûlée comme sorcière.
Mais cette fois, elle y échappera. Grâce à la manœuvre habile de Cauchon
sur la question des habits d'homme et à la complicité probable de son
geôlier anglais, elle sera exfiltrée par le souterrain du château et on
en brûlera une autre à sa place...
L'important est de faire disparaître ce personnage encombrant pour tout le monde.
Le
« personnage public », mais pas l'actrice de chair et de sang – de «
Sang Real » – qui l'incarne... Nul ne touche au « San-Graal » ! Pas même
des Anglais s'ils sont initiés au secret de son identité réelle.
L'histoire pourrait s'arrêter là.
La Pucelle d'Orléans est officiellement morte, brûlée à Rouen en ce 29 Mai 1431.
Point-barre
! Tout le monde est content : le roi n'a plus de concurrente féminine,
les papes ne craignent plus son arbitrage, les Anglais ne craignent plus
sa fougue guerrière ni sa réputation de sainteté, on peut donc
tranquillement discuter, comme à Yalta cinq siècles plus tard, du
partage du gâteau européen. C'est à Arras que ça se passe durant la
résidence surveillée de Jeanne en Savoie.
Pourquoi
faut-il que cette harpie réapparaisse quatre ans plus tard à la
frontière du Luxembourg ? Pourquoi faut-il qu'elle vienne se faire
reconnaître de ses frères de lait, les du Lys, des Orléanais et des
édiles locaux, et même du Roi ?
C'est
que Jeanne n'est pas de la pâte dont on fait les nouilles ! - elles
n'arriveront qu'un peu plus tard avec Marco Polo –. Bien que mariée à un
noble cousin de Baudricourt, Robert des Armoises qu'elle a rencontré
bien avant son épopée et avec qui elle a maintenant deux enfants, elle a
encore des choses à faire... Calais reste une enclave anglaise sur le
continent, mais le pire est surtout du domaine religieux : Elle se rend
en Allemagne pour influencer le choix du Prince-Electeur !
Mais
l'auréole de la Pucelle n'est plus là pour la propulser à nouveau au
premier rang comme autrefois. Elle se fait fermement reconduire à la
frontière, sous menace d'excommunication.
C'en
est trop. Cette fois, elle va rentrer chez elle – chez eux – en
Lorraine, à Metz d'abord, dans une maison voisine de l'église
Ste-Ségolène, puis dans leur propriété de Jaulny où elle vivra
tranquillement encore une petite vingtaine d'années.
C'est
seulement lorsqu'elle aura rendu son dernier souffle, à 49 ans, qu'en
1456 sa « famille » et le Roi de France exigeront du nouveau pape un
procès en révision.
Jeanne
aura vécu comme aucune autre femme de son temps, et sans doute comme
aucune autre femme de tous les temps... En femme battante, affranchie de
tous les dogmes tant religieux qu'ecclésiastiques ou machistes.
Orléans le 23 Septembre 2015
Jack Minier
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